Le projet pilote mené par le CAMECO " Our County- Our Responsibility ! Community media mobilising for accountability in Kenya", financé par le Ministère fédéral de la coopération économique et du développement (BMZ) pour une durée d'un an, a montré des résultats positifs en accroissant la participation civique, la sensibilisation et la transparence sur la manière dont les budgets des gouvernements locaux sont dépensés.
En 2010, le Kenya a adopté une nouvelle constitution et voté la décentralisation du gouvernement. Quarante-sept comtés ont été créés, et les gouvernements des comtés ont négocié une relation de travail avec le gouvernement national en termes de partage du pouvoir et des revenus.
Cette décentralisation repose sur trois piliers : la participation de la population, la transparence et la responsabilité. Tous les cinq ans, chaque comté soumet un plan de développement intégré du comté (CIDP - County Integrated Development Plan), qui définit les domaines de développement, les objectifs et les lignes budgétaires respectifs. Selon la Constitution, les mesures de développement énoncées dans ces documents doivent également refléter les priorités des citoyens, qui résultent d'un processus participatif dans lequel les citoyens sont impliqués, et leurs avis et recommandations sont pris en compte.
Toutefois, les résultats du projet pilote confirment ce qui avait déjà été démontré par une recherche suprarégionale : les préoccupations des citoyens dans les huit comtés cibles sélectionnés contrastent souvent avec les mesures qui ont été décidées. La majorité de la population n'a pas été informée de la tenue de soi-disant forums de citoyens au cours desquels les plans devaient être présentés et discutés. Les CIDP n'étaient pas accessibles deux semaines auparavant, comme prévu. La durée des forums était extrêmement limitée et laissait peu de place au dialogue et à la participation. Le langage technocratique et la complexité des procédures budgétaires étaient largement incompréhensibles pour les personnes présentes, de sorte qu'une participation authentique et critique des citoyens n'était que peu envisageable. L'approche "gouvernement transparent - données transparentes" promue par le gouvernement est insuffisamment mise en œuvre. La redevabilité est largement négligée par les gouvernements des comtés. Le principe de transparence n'est pas institué en ce qui concerne les projets de développement prévus ou mis en œuvre. Parmi les représentants de la population interrogés dans le cadre du projet pilote, 94 % ont déclaré que le népotisme et le favoritisme sévissaient dans les administrations de leur district et que les détournements de fonds, la corruption et les malversations étaient monnaie courante. Enfin, le fait que des fonctionnaires de district de six des huit comtés participant au projet aient été convoqués par la Commission d'éthique et de lutte contre la corruption (EACC) et le Directeur du ministère public (DPP) pour corruption et détournement de fonds, est une preuve évidente du manque de transparence et de responsabilité des gouvernements locaux.
Dans une telle situation, la fonction d'information et de contrôle des médias locaux joue un rôle clé. Ils ont le potentiel et la possibilité de promouvoir la participation aux débats et de parler de la gestion des affaires publiques, car ils ont l'accès le plus immédiat et le plus direct à la population, en particulier dans les communautés rurales.
Dans le cadre du projet pilote, le réseau des médias communautaires du Kenya (KCOMNET) et l'institut de recherche en sciences sociales Jesuit Hakimani Centre (JHC) ont coopéré pour permettre à 14 radios citoyennes de huit comtés de comprendre le processus politique et le contenu des plans de développement local et leur mise en œuvre. L'objectif principal de la phase pilote était de motiver la population à participer activement aux processus décisionnels démocratiques et à exiger une bonne gouvernance. Des sujets tels que le mandat et le rôle des fonctionnaires, le processus de participation publique, les cycles budgétaires, etc. ont d'abord été transmis aux journalistes, puis abordés dans e cadre de 42 productions radiophoniques et 24 pièces de théâtre, téléchargeables sur https://sikika.net.
En outre, JHC avait auparavant interrogé la population sur son niveau antérieur de participation et sur ses principales préoccupations. Les résultats de cette enquête ont été exposés dans un document stratégique pour chacun des huit comtés.
Après l'achèvement de la phase pilote, au cours de laquelle les médias communautaires ont bénéficié d'un soutien en termes de documents de référence spécifiques aux comtés (tels que des fiches d'information, des affiches et des brochures sur les comtés), des formations et des productions sur mesure en matière de développement de contenu médiatique au niveau des comtés ont été réalisées ; tout comme la mobilisation des communautés pour qu'elles participent à des forums publics dans les comtés, etc.
La participation des citoyens aux forums publics au niveau des comtés a augmenté en moyenne d'environ 50% grâce aux reportages réalisés, et les lacunes de la politique d'information des gouvernements de district ont été mises en évidence.
Cependant, il est également apparu que les journalistes des stations de radio citoyennes ne sont pas suffisamment qualifiés pour faire eux-mêmes des recherches sur des sujets liés au développement, pour préparer les reportages basés sur les données de manière journalistique, et pour vérifier la véracité des déclarations de leurs interlocuteurs.
Sur la base des besoins prioritaires définis par KCOMNET, le CAMECO a développé un projet de suivi, prévu d'octobre 2020 jusqu'en fin 2023, en coopération avec le réseau de radios et le nouveau partenaire Code for Africa (CfA), une ONG engagée dans la promotion des données transparentes et du journalisme de données.
Le nouveau projet “Our County- Our Responsibility: Telling Data Stories - Revealing Citizen’s Realities” comprend des programmes de formation complets (par exemple, techniques de recherche, journalisme de données, reportages axés sur les solutions), et la conception d'un outil informatique en ligne (County Data Information System - CDIS), qui sera maintenu en permanence, créant ainsi une transparence des données pour les programmes de développement des gouvernements des comtés.
La coopération avec les jeunes journalistes en herbe est systématiquement étendue dans le cadre du projet de suivi, afin d'améliorer l'éducation politique des jeunes et d'intégrer leurs préoccupations dans le débat public. (asj /PS)